AMNESTY
INTERNATIONAL
DÉCLARATION
PUBLIQUE
Index
EUR
44/6602/2017
AILRC-FR
26
juin 2016
Turquie.
L’interdiction de la Marche des fiertés d’Istanbul est le
dernier coup porté à la liberté d’expression et de réunion
pacifique
Pour
la troisième année consécutive, les autorités d’Istanbul ont
interdit, pour des motifs fallacieux, le défilé de la Marche des
fiertés qui est historiquement l’événement le plus important
organisé en Turquie par les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles
et transgenres (LGBT) et ceux qui les soutiennent.
Dimanche
25 juin, la police a fait un usage excessif et injustifié de la
force contre des personnes qui tentaient de défiler pacifiquement en
bravant l'interdiction.
Cet
événement, qui s’était déroulé avec succès chaque année
pendant plus d’une décennie et qui attirait des dizaines de
milliers de participants, avait été cité par les autorités comme
un exemple de leur respect pour les droits.
L’interdiction
répétée de la Marche des fiertés ces dernières années est un
nouvel exemple de l’intolérance des autorités envers la
dissidence et la différence ainsi que de la dégradation générale
de la situation des droits humains en Turquie et de l’incapacité
des autorités à faire respecter les droits des LGBT.
Le
bureau du gouverneur d’Istanbul avait publié une déclaration le
24 juin, soit la veille du défilé, dans laquelle il invoquait
la nécessité de garantir la sécurité des participants et des
touristes dans la zone concernée et de faire respecter l’ordre
public. Il mentionnait également l’absence de notification
appropriée de la manifestation.
Le
défilé a été interdit alors que le comité organisateur avait
informé les autorités et entamé un dialogue avec elles plusieurs
semaines avant la date prévue pour la Marche des fiertés.
Bien
qu’il existe des motifs légitimes de restriction du droit à la
liberté de réunion pacifique, l’interdiction du défilé par les
autorités et les motifs invoqués vont directement à l’encontre
des obligations de la Turquie découlant du droit à la liberté de
réunion pacifique protégé par les normes internationales,
notamment la Convention européenne des droits de l’homme et la
Constitution turque.
Amnesty
International considère l’interdiction comme une tentative
flagrante des autorités d’empêcher les personnes LGBT et ceux qui
les soutiennent de s’exprimer, ce qui constitue une violation de
leur droit à la liberté d’expression et de réunion pacifique.
Dimanche
25 juin, une vaste opération de police regroupant plusieurs
centaines de policiers en civil et de membres des brigades
antiémeutes, appuyés par des véhicules équipés de canons à eau
et un hélicoptère, a véritablement bouclé la zone dans laquelle
le défilé devait avoir lieu.
Des
policiers ont également bloqué les rues adjacentes et empêché des
personnes considérées comme des manifestants potentiels d’accéder
à la zone où devait se dérouler la Marche des fiertés.
Alors
que l’opération de police empêchait des personnes qui
souhaitaient participer au défilé de se rassembler en un seul
groupe, la police a fait un usage excessif et injustifié de la force
en utilisant des chiens, du gaz lacrymogène et des balles en
caoutchouc contre des petits groupes de personnes qui tentaient de
rejoindre le défilé.
Des
observateurs d’Amnesty International ont vu des policiers qui
arrêtaient des personnes de manière arbitraire, apparemment au
hasard, dans les groupes qui s’étaient formés.
Des
avocats ont déclaré à l’organisation que 26 personnes, dont
deux enfants et au moins un journaliste qui rendait compte de la
Marche des fiertés, ont été interpellés et relâchés par la
suite.
Selon
certaines sources, une quinzaine de contre-manifestants ont également
été brièvement retenus par la police.
Amnesty
International appelle les autorités à ne pas engager de poursuites
pénales contre les participants à la Marche des fiertés d’Istanbul
qui ont été arrêtés et à veiller au respect du droit à la
liberté de réunion pacifique de tous les individus, y compris ceux
qui participent à des défilés de la Marche des fiertés.