Amnesty International condamne l'interdiction de la marche des fiertés de Kiev
Amnesty International condamne dans les termes les plus forts la décision du conseil municipal de Kiev d’interdire toutes les manifestations publiques, dont la première marche des fiertés LGBTI, dans le centre-ville, le week-end du 24 mai, malgré les assurances de la police indiquant que les participants de cette marche seraient protégés.
L'organisation exhorte les autorités à annuler immédiatement cette décision, et à travailler plutôt à assurer la sécurité des participants de cette manifestation.
Le conseil municipal a déclaré qu'il avait pris cette décision du fait de la nécessité de gérer un grand nombre d'événements et d'animations culturelles dans toute la ville pour la Journée de Kiev, une célébration annuelle de cette cité. Or, c'est la première année que le conseil municipal décide d'interdire toute manifestation qu'il n'aurait pas organisé spécifiquement dans le cadre de cette journée.
« Interdire la première marche des fiertés de l'Ukraine au motif qu'elle risquerait de détourner l'attention d'autres célébrations est une violation flagrante des obligations des autorités ukrainiennes, qui doivent garantir le droit à la liberté de réunion pacifique sans discrimination », a déclaré depuis Kiev Max Tucker, spécialiste de l'Ukraine à Amnesty International.
L'article 11 de la Convention européenne des droits de l'homme, à laquelle l'Ukraine est partie, indique clairement que le droit à la liberté de réunion ne peut être restreint que dans des circonstances exceptionnelles, comme dans l'intérêt de la sécurité nationale ou de la sécurité publique, ou encore dans le cadre de la prévention des troubles et infractions pénales.
Le conseil municipal de Kiev ne doit pas utiliser des excuses, comme le souhait d'assurer le bon déroulement des manifestations culturelles dans toute la ville, pour bafouer l'obligation internationale qu'a l'Ukraine de garantir le droit à la liberté de réunion pour tous et sans discrimination.
Dans sa déclaration, le conseil municipal a également affirmé que la mesure était nécessaire pour assurer l'ordre public et la protection de la vie et de la santé des citoyens. Cependant, la police de la ville de Kiev soutient qu'elle est en mesure de protéger cette marche des fiertés.
« Il y aura assez de policiers pour empêcher les attaques », a déclaré Igor Mikhalko, chef du service de presse pour Kiev au ministère de l'Intérieur ukrainien.
L'argument sécuritaire du conseil municipal est donc sans fondement.
Le conseil a par ailleurs déclaré que le grand nombre de plaintes et de demandes de contre-manifestations dans la zone prévue pour le déroulement de cette marche l'avait conforté dans sa décision. L'envoi d'un grand nombre de demandes de contre-manifestations est souvent utilisé comme tactique pour obtenir l'interdiction des événements LGBTI en Ukraine.
« L'Ukraine a pour obligation de protéger les droits de réunion pacifique et d'expression de toutes les personnes, pas seulement les points de vue de la majorité », a ajouté Max Tucker.
En raison de la nature générale de l'interdiction, les organisateurs de la KyivPride 2013 ne sont pas considérés comme partie prenante dans cette affaire et n'auront pas la possibilité de contester cette interdiction en justice.
Les organisateurs pourraient éventuellement former un recours après un jugement, mais la décision du conseil de soumettre la demande d'interdiction le 21 mai signifie de toute façon qu'il n'y aurait aucune possibilité de faire appel avant le 25 mai.
« Non seulement le conseil tente de nous priver de notre droit à la liberté de réunion, mais il nous refuse également la possibilité d'un procès équitable devant un tribunal », a déclaré Stas Mischenko, responsable des communications de la KyivPride 2013.
La première notification de cette marche des fiertés a été soumise aux autorités de Kiev le 11 avril. Les organisateurs annonçaient leur intention de faire le défilé dans la rue Khreschatyk.
En réponse à cette annonce, le conseil municipal a invité les organisateurs à une réunion pour leur indiquer que, le 25 mai, divers concerts de musique auraient lieu dans la zone concernée pour la Journée de Kiev.
« Nous avons donc discuté d'un nouvel itinéraire avec le conseil, qui a dit qu'il n'avait pas prévu d'événements dans ce secteur, et nous avons présenté une nouvelle notification, avec un parcours modifié, le 19 avril », a précisé Stas Mischenko.
Le 7 mai, le conseil municipal a déclaré avoir organisé une course de vélo sur le nouveau parcours, et les organisateurs ont accepté de modifier l'heure du défilé, en soumettant une nouvelle notification le 21 mai.
« Nous avons fait de notre mieux pour nous adapter aux célébrations de la Journée de Kiev, mais il est clair que le conseil ne veut tout simplement pas que la marche ait lieu », a déclaré Stas Mischenko.
En tant que partenaire soutenant la KyivPride 2013, Amnesty International a envoyé une délégation internationale pour y participer, et a recueilli jusqu'à présent plus de 22 000 signatures dans toute l'Europe pour demander que cet événement puisse avoir lieu.
L'Union européenne soutient également la marche des fiertés de Kiev. Elle a demandé aux autorités locales et à la police de faire tout leur possible pour éviter que cette marche, comme l'an dernier, soit annulée, et d'offrir à tous la possibilité d'exercer le droit à la liberté de réunion pacifique, sans que la sécurité des personnes concernées soit compromise.
Les ambassades d'Allemagne, de Suède, de Norvège, des États-Unis, du Royaume-Uni, des Pays-Bas et du Canada ont également appelé les autorités ukrainiennes à faire en sorte que la marche des fiertés puisse se dérouler en toute sécurité.
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