samedi 26 novembre 2016

Communiqué de Presse Amnesty: Il faut protéger les personnes réfugiées contre les violences sexuelles et liées au genre

Les gouvernements de par le monde doivent de toute urgence fournir une meilleure protection aux femmes et filles réfugiées, ainsi qu'aux personnes LGBTI réfugiées (lesbiennes, gays et personnes bisexuelles, transgenres et intersexuées), qui sont en butte à de nombreuses violences sexuelles et liées au genre à chaque étape de leur périple, a déclaré Amnesty International vendredi 25 novembre 2016 à l'occasion du lancement de la campagne internationale Seize jours d’action contre la violence liée au genre.
« Imaginez : vous vivez dans un camp de réfugiés, où vous avez trop peur pour aller aux toilettes et où vous êtes victime de harcèlement sexuel chaque jour dans le pays d'accueil en raison de votre genre ou de votre identité. Cette réalité terrifiante, c'est celle que vivent à travers le monde des centaines de milliers de réfugiées, femmes, filles et personnes LGBTI, et l'inaction des gouvernements des pays riches la fait perdurer, a déclaré Catherine Murphy, directrice par intérim du programme Genre, sexualité et identité à Amnesty International.
« Pour marquer le début de la campagne annuelle Seize jours d’action contre la violence liée au genre, nous exhortons les gouvernements du monde entier à mettre en œuvre leurs obligations légales afin d'éliminer les violences fondées sur le genre. Pour cela, ils doivent prendre des mesures ciblées, notamment garantir que la police assure un environnement sûr et confidentiel aux réfugiées, pour qu'elles puissent signaler de tels actes de violence.
« Il est vital également que la communauté internationale se mobilise afin de partager la responsabilité en matière de protection des réfugiés, en augmentant de manière significative le nombre de places de réinstallation offertes à ceux qui ont un besoin criant de protection. La pauvreté et l'insécurité dans lesquelles de nombreuses personnes réfugiées se retrouvent dans des pays comme le Liban et la Libye accroissent le risque d'exploitation sexuelle et de violence fondée sur le genre. »
Seize jours d’action contre la violence liée au genre est une campagne mondiale, coordonnée par le Center for Women's Global Leadership, qui a pour but de sensibiliser aux violences faites aux femmes et aux filles. Elle est l'occasion de mettre en œuvre la solidarité internationale dans la lutte pour mettre un terme aux violences faites aux femmes.
De dangereux périples
Les réfugiés et les migrants en transit sont particulièrement exposés aux violations de leurs droits, notamment aux violences et à la traite des êtres humains. Les femmes, les filles et les personnes LGBTI sont en butte à des menaces spécifiques comme le harcèlement sexuel, le viol et d'autres formes de violence liée au genre, ce qui renforce la nécessité d'établir des itinéraires sûrs et légaux.
En 2016, des réfugiées et des migrantes d'Afrique subsaharienne qui étaient passées par la Libye ont raconté à Amnesty International que le viol était tellement courant lors des voyages aux mains des passeurs qu’elles avaient pris des pilules contraceptives avant de partir pour ne pas risquer de tomber enceintes si elles se faisaient violer.
En outre, on constate que la violence liée au genre est de plus en plus l’une des causes qui contraignent les femmes et les personnes LGTBI à fuir leurs pays d'origine en quête de protection dans d'autres États. Patricia* [son nom a été modifié], femme transgenre de 32 ans, a raconté à Amnesty International le harcèlement et la persécution qu'elle a subis au Salvador :
« Des policiers m'ont suivie, m'ont extorqué de l'argent, et m'ont harcelée et frappée. Ils disaient qu'ils ne m'aimaient pas à cause de " ce que je suis ". J'ai aussi été menacée par des bandes criminelles – chaque mois ils me demandaient un " loyer ", mais je n'avais pas les moyens d'en régler la totalité. Je pense que j'ai été menacée par discrimination ou homophobie, à cause de mon identité. J'ai bien songé à aller voir les autorités, mais j'ai réalisé que c'était les mêmes personnes que celles qui me harcelaient. »
Craignant pour sa sécurité, Patricia a décidé de partir au Mexique, mais a été expulsée au bout de quelques mois, durant lesquels elle a été frappée et dévalisée à deux reprises.
Amnesty International dénonce le fait que les femmes, les filles et les personnes LGBTI réfugiées qui fuient des violences extrêmes dans les pays du « Triangle nord » de l'Amérique centrale (Guatemala, Salvador et Honduras) sont exposées aux violences fondées sur le genre à la fois dans leurs pays d'origine et dans les pays de transit. Des pays d'accueil comme le Mexique ne leur offrent pas une protection adéquate : en 2015, 98 % des migrants originaires d'Amérique centrale arrêtés par les autorités mexicaines en tant que clandestins ont été renvoyés dans leurs pays d'origine.
Absence de protections juridiques
Partout dans le monde, des femmes et des filles réfugiées sans papiers en règle se retrouvent confrontées au même dilemme : ne pas signaler les crimes dont elles sont victimes, ou dénoncer ces crimes et risquer d’être détenues, expulsées ou sanctionnées parce qu'elles n'ont pas de permis de séjour valides.
Maryam* [son nom a été modifié], une Syrienne originaire de Homs arrivée au Liban en 2013, a déclaré à Amnesty International que des policiers passaient souvent à la maison qu'elle louait avec des femmes de sa famille et menaçaient de les jeter en prison si elles refusaient de « sortir » avec eux. Elle a déclaré :
« Le harcèlement [des réfugiées] est un gros problème au Liban. Peu importe que je sois célibataire ou mariée, je suis sans cesse harcelée. C'est pourquoi nous avons peur pour nos enfants. J'ai une fille de 16 ans et je n'ose même pas l'envoyer à la boutique toute proche. »
Cette année, Amnesty International demande à ses sympathisants d'envoyer des messages de solidarité à un groupe de femmes yézidies originaires du nord de l'Irak qui ont dû fuir en août 2014, lorsque le groupe armé se désignant sous le nom d'État islamique (EI) a envahi la région et lancé une campagne systématique de nettoyage ethnique. Elles sont restées bloquées en Grèce, dans des conditions très difficiles.
Pendant plus de cinq mois, elles ont séjourné au camp de Nea Kavala, où les conditions sont déplorables : peu d'éclairage, pas de toilettes ni de douches sûres et séparées, et aucun mécanisme permettant de signaler des actes de harcèlement sexuel. Ne se sentant pas du tout en sécurité dans ce camp, ces femmes ont constitué un « cercle de protection » pour veiller les unes sur les autres, en l'absence de protection des autorités. Ce groupe a depuis déménagé dans un autre camp. 
« La Grèce et les pays qui accueillent des réfugiés doivent agir sans délai pour améliorer les conditions d'accueil de ceux qui restent bloqués dans le pays, notamment en prenant des mesures adaptées pour assurer la sécurité des femmes et des filles réfugiées, a déclaré Catherine Murphy.
« Minimum absolu, les femmes, les jeunes filles et les personnes LGBTI doivent avoir accès en toute sécurité à des toilettes et à des lieux pour dormir, ainsi qu'à des services et des soins de santé pour celles qui ont subi des violences liées au genre. »
Envoyez un message de solidarité aux femmes yézidies et montrez-leur qu'elles ne sont pas seules.
Complément d'information
Les violences liées au genre sont des violences commises contre une personne en raison de son genre. Elles peuvent viser des femmes et des filles, mais aussi d'autres personnes en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identité ou expression de genre réelle ou supposée, ainsi que des hommes du fait d'attitudes discriminatoires vis-à-vis de ce qui constitue la « masculinité ».

Les déplacements forcés ont atteint un niveau record en 2015. Environ 10,5 millions de femmes et de filles réfugiées étaient enregistrées à la fin de l'année.

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