Indonésie. L’arrestation de 51 personnes avive l’hostilité du climat dans lequel vivent les personnes LGBTI
L’arrestation
de 51 personnes, dont sept étrangers, dans un sauna du centre de
Djakarta le 6 octobre 2017 est symptomatique de l’hostilité croissante
du climat dans lequel vivent les personnes LGBTI en Indonésie. La
plupart des clients du sauna ont été libérés le lendemain, mais la
police maintient toujours en détention cinq employés. Les policiers ont
accusé six personnes de fournir des services de pornographie et de
prostitution.
Lors
d’une descente dans un sauna de Djakarta le 6 octobre à 20 h 00, la
police a interpellé 51 personnes pour leur participation à une présumée
partie fine homosexuelle. Après avoir libéré la plupart d’entre elles,
la police a accusé cinq employés du sauna et son propriétaire - qui n’a,
lui, pas été arrêté - de pornographie et de prostitution. Ces chefs
d’inculpation sont prévus par les articles 4 et 30 de la Loi de 2008
relative à la pornographie et par l’article 296 du Code pénal, relatif à
la prostitution.
La
Loi relative à la pornographie définit ce terme de manière très large,
comme englobant tout matériel qui « enfreint les normes de la moralité
de la communauté », et prévoit une peine d’emprisonnement pouvant aller
de quatre à quinze ans pour les personnes qui produisent, diffusent,
financent ou utilisent ce matériel, ou qui fournissent des services à
caractère pornographique. Des lois formulées en termes ambigus sur la
pornographie sont souvent exploitées pour s’en prendre délibérément aux
personnes LGBTI, les privant du droit fondamental à la vie privée et du
droit d’avoir des relations sexuelles consenties.
L’homosexualité
n’est pas illégale aux termes du droit national indonésien, sauf dans
la province de l’Aceh, qui applique le Code pénal islamique (Qanun
Jinayat). En mai 2017, deux hommes de cette région ont reçu 83 coups de
bâton après avoir été maintenus en détention pendant deux mois. C’est la
première fois que des hommes homosexuels ont reçu ce châtiment en
application des dispositions du Qanun Jinayat relatives à la sodomie
(liwat) dans la province. En mai, néanmoins, 141 hommes ont été arrêtés à
Djakarta après avoir participé à ce que la police a décrit comme une «
partie fine homosexuelle ». Au moins trois descentes de police ont visé
les personnes LGBTI en Indonésie cette année.
Amnesty
International s’inquiète également de la progression de la
discrimination dont souffrent les personnes LGBTI sous l’effet d’une
série de restrictions et de déclarations acharnées, incendiaires et
inexactes dont les représentants de l’État sont responsables depuis deux
ans sous le prétexte de « défendre la moralité publique ». En février
2016, la police a dispersé les participants à un atelier organisé à
Djakarta par une ONG de premier plan œuvrant à la défense des droits des
personnes LGBTI, et a empêché un rassemblement pacifique pro-LGBTI de
se tenir à Yogyakarta. Le même mois, la Commission indonésienne de
l'audiovisuel a publié une lettre recommandant à toutes les chaînes de
télévision et stations de radio d’interdire les programmes faisant la
promotion des activités LGBTI, dans le but de « protéger les enfants ».
Toujours en février, alors que les discours anti-LGBTI s'intensifiaient,
l'école islamique Al Fatah pour les personnes transgenres, à
Yogyakarta, a été forcée de fermer après avoir fait l'objet de menaces
et de manœuvres d'intimidation de la part du Front islamique djihadiste.
Amnesty
International demande instamment aux autorités indonésiennes de mettre
un terme aux pratiques discriminatoires à l’encontre des personnes
LGBTI. En septembre 2017, à l’occasion de l’Examen périodique universel
de l’Indonésie au Conseil des droits de l'homme des Nations unies, le
gouvernement a accepté les recommandations suivantes : « veiller à ce
que les dispositions juridiques et constitutionnelles protégeant les
droits de l’homme [...] soient pleinement mises en œuvre à l’échelle
nationale ; abroger les arrêtés locaux discriminatoires contraires à la
Constitution indonésienne ; accorder un rang de priorité élevé aux
questions d’égalité et de non-discrimination, y compris en ce qui
concerne les lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres ». Après une
telle avancée, le gouvernement indonésien devrait garantir la protection
des personnes LGBTI et mettre en place un environnement favorisant
davantage leur intégration.
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