AMNESTY INTERNATIONAL
COMMUNIQUÉ DE PRESSE
EMBARGO : lundi 27 novembre 2017, 00 h 01 Mexique (06 h 00 TU)
AILRC-FR
Mexique/Amérique centrale. Les autorités tournent le dos aux réfugiés LGBTI
La
vie et la sécurité des lesbiennes, gays et personnes bisexuelles,
transgenres ou intersexuées (LGBTI) du Salvador, du Guatemala et du
Honduras, pays marqués par la violence, sont de plus en plus menacées
car les autorités de ces pays ne protègent pas ces personnes, ce qui ne
leur laisse pas d’autre choix que de fuir leur pays et de se retrouver
exposées à d’autres dangers au Mexique, a déclaré Amnesty International
aujourd’hui dans un nouveau rapport.
No
Safe Place décrit les voyages périlleux de gays et de femmes
transgenres réfugiés fuyant les discriminations et les violences liées
au genre en très forte augmentation au Salvador, au Guatemala et au
Honduras, qui sont le fait de bandes criminelles et de membres des
forces de sécurité. Il accuse également les autorités mexicaines de ne
pas protéger ces personnes contre les violations et les atteintes à
leurs droits lorsqu’elles traversent le pays, et met l’accent sur des
expériences insoutenables vécues lors des détentions prolongées et
systématiques des migrants aux États-Unis.
«
Les gens sont confrontés à une discrimination féroce en Amérique
centrale en raison de leur identité de genre et n’ont absolument nulle
part où aller pour être en sécurité », a déclaré Erika Guevara-Rosas,
directrice du programme Amériques d’Amnesty International.
«
Terrorisés chez eux et victimes d’atteintes aux droits humains quand
ils tentent de trouver refuge à l’étranger, ils font à présent partie
des réfugiés les plus vulnérables des Amériques. Le fait que le Mexique
et les États-Unis restent passifs alors qu’ils sont victimes de
violences extrêmes est tout simplement criminel. »
Le Salvador, le Guatemala et le Honduras ont des taux d’homicides parmi les plus élevés au monde
– 81,2 pour 100 000 habitants au Salvador, 58,9 au Honduras et 27,3 au Guatemala, selon les chiffres officiels.
La
plupart des réfugiés et des demandeurs d’asile qui se sont entretenus
avec Amnesty International ont témoigné qu’en raison de la
discrimination constante et des nombreuses violences auxquelles ils
avaient été confrontés dans leur pays (notamment des agressions
physiques et des manœuvres d'extorsion financière aux mains de bandes
criminelles, ainsi que des homicides), la fuite avait été pour eux la
seule solution.
L’impunité
et la corruption dans ces pays étant très répandues, la probabilité que
les autorités sanctionnent les auteurs d’infractions contre des
personnes LGBTI est faible, notamment quand les forces de sécurité sont
responsables de ces attaques.
Selon
l’ONG hondurienne Cattrachas, 264 personnes LGBTI ont été tuées dans le
pays entre 2009 et 2017. Dans la plupart des cas, les responsables
n’ont jamais été traduits en justice.
Carlos,
originaire du Honduras, a dû fuir au Mexique après avoir été violemment
agressé et menacé de mort par une bande criminelle parce qu’il était
gay.
Il a dit à Amnesty
International : « Je n’ai jamais essayé de signaler [ces attaques] à
cause de ce qui est arrivé à certains de mes amis. Un de mes amis a
signalé une agression, et immédiatement après, ceux qui l’avaient
commise sont venues le chercher chez lui. C’est pour ça qu’il a fui au
Mexique. Un autre de mes amis a été tué juste après avoir signalé ce qui
lui était arrivé. »
Un voyage terrifiant
Amnesty
International a constaté, sur la base des cas sur lesquels elle a
recueilli des informations, que la brutalité à laquelle les gays et les
femmes transgenres sont confrontés en Amérique centrale ne s’arrête pas
une fois qu’ils ont quitté leur pays.
La
plupart des personnes interrogées pour le rapport ont dit avoir été à
nouveau soumises à des discriminations et à des violences, notamment par
des fonctionnaires, au Mexique, où un grand nombre de violences contre
les personnes LGBTI en général sont signalées. Beaucoup d’entre elles
ont également déclaré qu’elles ne se sentaient pas en sécurité au
Mexique, car nombre des bandes criminelles qui les menaçaient dans leur
pays opèrent aussi de l’autre côté de la frontière sud du Mexique.
Selon
une étude du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés,
deux tiers des réfugiés LGBTI d’Amérique centrale interrogés en 2016 et
2017 avaient subi des violences sexuelles et liées au genre au Mexique.
Plusieurs
gays et femmes transgenres ont également signalé à Amnesty
International qu’ils n’avaient pas été dûment informés de leur droit de
demander l’asile au Mexique, malgré les dangers extrêmes auxquels ils
seraient confrontés s’ils étaient renvoyés chez eux. Ils se sont aussi
plaints que les autorités mexicaines ne les tenaient pas informés
d’éventuels progrès dans les enquêtes ouvertes après qu’ils ont signalé
avoir été victimes d’atteintes aux droits humains dans le pays.
Carlos
a dit à Amnesty International que quand il était au Mexique, des
représentants des services d’immigration avaient tenté de le dissuader
de déposer une demande d’asile. Il n’en a finalement pas tenu compte et a
demandé l’asile. Il attend toujours une réponse.
Un
certain nombre de femmes transgenres qui ont réussi à survivre au
voyage dangereux à travers le Mexique et qui ont franchi la frontière
pour rejoindre les États-Unis se sont plaintes du traitement qui leur
avait été réservé en détention. D’autres ont été expulsées des
États-Unis et du Mexique et renvoyées dans leur pays, vers le cauchemar
auquel elles avaient désespérément tenté d’échapper.
Cristel,
une femme transgenre de 25 ans, originaire du Salvador, a dit à Amnesty
International qu’elle avait été placée en détention à l’isolement dans
un centre des services américains de l’immigration juste après avoir
traversé la frontière entre le Mexique et les États-Unis, en avril 2017.
Une semaine plus
tard, elle a été transférée dans une cellule exigüe qu’elle a dû
partager avec huit hommes. Cristel n’a finalement pas obtenu l’asile et a
été renvoyée au Salvador, où des bandes criminelles continuent à la
menacer.
« Je ne veux pas être clandestine. Je veux juste vivre et être en sécurité, » a-t-elle dit à Amnesty International.
«
Moins les autorités du Salvador, du Honduras, du Guatemala, du Mexique
et des États-Unis prendront de mesures pour protéger les personnes les
plus vulnérables des Amériques, plus elles auront de sang sur les mains
», a déclaré Erika Guevara-Rosas.
«
Ces gouvernements doivent adopter de toute urgence des mesures
décisives pour lutter contre la multiplication des violences contre les
personnes LGBTI dans cette région et améliorer leurs politiques et leurs
pratiques afin que toutes les personnes qui ont besoin d’une protection
internationale puissent y avoir accès. »
Pour plus d’informations :
No
Safe Place: Salvadorans, Guatemalans and Hondurans seeking asylum in
Mexico based on their sexual orientation and/or gender identity (Rapport
(en anglais), 27 novembre 2017)
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